mercredi 25 novembre 2020

Des amis pour la vie

Depuis la nuit des temps, les microbes, les plus petits et les plus anciens habitants de notre planète, sont de véritables artistes de la survie. Ils sont absolument partout. Il n’y a aucun endroit sur terre où ils n’arrivent pas à vivre. Sans eux, pas de vie. Ils sont impliqués dans tous les processus de notre organisme. Ils s'adaptent immédiatement à toutes les conditions de vie et il est impossible de les apprivoiser. Mais ce n’est pas pour autant qu’ils sont nos ennemis. La recherche actuelle sur les microbes nous montre qu’ils sont surtout utiles. Seulement un pour cent, dans certaines conditions, peut nous mettre en danger. Une bonne raison de les traiter comme des amis. 

Depuis le bestseller de Giulia Enders Le charme discret de l’intestin, les microbes ont fait leur entrée en scène pour legrand public. Pas une semaine sans que nous apprenions quelque chose de nouveau sur les microorganismes. Bactéries, virus, champignons - cette « petite vie » invisible à l’œil est réellement partout : dans nos corps, sur chaque poignée de porte, dans notre fromage, dans le sol, les nuages, la glace polaire, le désert, et même dans l'espace. Aucun endroit n'est à l'abri de la petite vie. Environ un quadrillion de microbes sont en action sur et dans notre corps. Nous avons en nous jusqu'à dix fois plus de microbes que de cellules. Ils sont actifs dans tous nos organes et se rendent utiles non seulement dans nos intestins, mais aussi nos poumons, notre cœur et notre cerveau. 

Les nouvelles découvertes sur les microbes sont une claque de plus pour notre égo. Non seulement nous avons dû accepter que la terre ne soit pas le centre de l'univers. Nous avons aussi dû accepter que nos parents les plus proches sont les singes et que c’est notre subconscient qui contrôle notre vie. Et maintenant c’est le coup de grâce : nos corps sont principalement composés de microbes. Ils se mêlent de tout : ils digèrent notre nourriture, nous fournissent de l'énergie, nous libèrent de nos déchets, nettoient notre organisme, produisent les vitamines que nous ne pouvons pas produire par nous-mêmes mais dont nous avons besoin pour vivre. Ils déterminent notre groupe sanguin, stimulent et soutiennent notre système immunitaire, nous protègent des agents pathogènes, influencent nos habitudes alimentaires, notre sexualité, nos fonctions cérébrales, notre comportement social et jusqu’à nos sentiments et notre caractère. Ce sont eux qui déterminent avec qui nous pouvons bien nous sentir. C’est ainsi qu’ils se mêlent même du choix de notre partenaire. 

Les microbes nous enveloppent comme des nuages. Aucun gant, aucun tissu ou vêtement ne les arrête. Là où nous nous asseyons, nous sommes attendu par le cocktail microbien de notre prédécesseur. Quelques heures dans la même pièce suffisent pour porter l'empreinte microbienne d'une autre personne durant toute notre vie. Lorsque nous vivons ou travaillons ensemble, nos microbiomes s’adaptent les uns aux autres. Les microbes de l’un ne combattent pas les microbes de l’autre comme des intrus indésirables, mais les accueillent pour coopérer. Plus la colonisation est diverse et variée, plus nous sommes protégés. Les microbes sont donc avant toute chose : utiles. 


Interaction créative

Seul environ un pour cent de toutes les espèces peut être dangereux - dans certaines circonstances. Normalement, nous n'avons rien à craindre de la petite vie. Un système immunitaire intact assure l'équilibre de l’organisme et est capable de compenser toute intrusion ou mauvaise colonisation. À travers les inflammations, les gonflements et les douleurs, nous sommes avertis que notre corps est en train de se débarrasser d’un problème. La fièvre, la toux et les sécrétions sont des signes que l'élimination fonctionne – et, sauf exception, ne doivent pas être supprimées. En faisant disparaître le symptôme, nous aggravons souvent le problème.

Et des problèmes, nous en avons : l’alimentation industrielle, la sédentarité, l’isolement, le manque de vitamines, l'excès d'hygiène et la prise de médicaments excessive perturbent gravement l’équilibre microbien et nous rendent sensibles aux agents pathogènes. Quand le film protecteur naturel de notre peau et de nos muqueuses est détruit, il laisse passer des intrus qui peuvent nous faire du mal. Ainsi, se désinfecter constamment les mains, prendre des douches trop chaudes et utiliser des nettoyants ménagers agressifs perturbent le bon fonctionnement de notre microbiome et nuisentdonc à notre santé. Un environnement stérile, des aliments pasteurisés, homogénéisés et irradiés ainsi que les antibiotiques – les agents contre la vie - détruisent progressivement notre système immunitaire. 

La nature fait pourtant bien les choses. Dès le début de notre vie, elle veille sur notre microbiome. Lors d’une naissance par voie naturelle, nous recevons toutes les bactéries dont nous avons besoin pour créer la base de notre système immunitaire. Les enfants nés par césarienne ne bénéficient pas de cette protection. Au lieu des microbes vaginaux et intestinaux de la mère, ils reçoivent les microbes des gens qui travaillent à l'hôpital et tout ce qui circule dans la salle d'accouchement. C’est loin d’être idéal pour des nouveau-nés. Surtout au cours des premiers mois de leur vie, ces enfants sont beaucoup plus sujets aux maladies que les enfants nés par voie naturelle.

L'allaitement maternel nous offre une autre protection importante. Au cours des premières années de la vie et lorsque le système immunitaire est en plein développement, il est important que l’organisme de l’enfant soit en contact avec des types de microbes variés. Les enfants qui grandissent dans une ferme avec beaucoup de plantes et d'animaux différents sont particulièrement bien protégés. En portant des objets à la bouche et en ayant autant de contacts sociaux que possible, l’enfant renforce son système immunitaire. Les maladies infantiles comme la rubéole, la rougeole, les oreillons et la varicelle, inoffensives dans la plupart des cas, lui offrent une protection à vie. 

Contre la vie

Ainsi, l'homme et le microbe forment une communauté vivante dont tous les deux profitent. Nous leur offrons le gîte et le couvert, ils s'occupent du reste. Au lieu de les poursuivre, nous devrions les remercier tous les jours pour ce qu’ils font pour nous. Mais nous choisissons le pourcent potentiellement pathogène et, depuis que Robert Koch et Louis Pasteur sont les icônes de la santé, nous partons en guerre contre la petite vie. Inexorablement, ces deux-là sont allés à la chasse pour traquer un ennemi invisible à l’œil nu : les germes. Il fallait les tuer coûte que coûte ! On est même allé jusqu’à proclamer que seulement un organisme exempt de microbes serait un organisme en bonne santé. 



Sur son lit de mort, Pasteur a finalement admis qu’il s’était trompé et que son adversaire Antoine Béchamp avait raison : « Le microbe n’est rien. Le terrain est tout. » Le chercheur allemand Robert Koch par contre est resté fidèle à ses erreurs toute sa vie. Ses bataillons de désinfection ont parcouru toutes les villes. En Afrique, on a monté des camps de concentration pour traiter les habitants de force avec des agents toxiques lourds. C’est depuis Koch et Pasteur que l’on maltraite les animaux dans les laboratoires au service d’une médecine de guerre. Bien que le chimiste bavarois Max von Pettenkofer ait avalé publiquement une culture de bactéries du choléra pour prouver que la simple équation hôte + agent pathogène = maladie ne tient pas la route, les chasseurs de microbes restent sur leurs piédestaux comme s'ils avaient été les sauveurs de l'humanité. 

La postérité ne se souvient pas que ni Pasteur ni Koch n’ont guéri de maladies de leur vivant. Lorsqu'un vaccin contre la tuberculose a été trouvé, la maladie avait déjà diminué de 90 pourcents toute seule, en partie parce que les conditions sociales et hygiéniques s'étaient considérablement améliorées. Le médecin allemand Rudolf Virchow avait clairement établi les liens entre la santé, l'éducation et les conditions de travail, et le chirurgien Ignaz Semmelweis avait contribué à réduire massivement la mortalité infantile et maternelle parce que suite à ses conseils, les médecins commençaient à se laver les mains entre les autopsies et les accouchements.

Des canons sur les moineaux

De plus en plus, la médecine moderne s’est focalisée sur le symptôme. Elle fait des prouesses en cas d'urgence. Elle intervient alors, pour ainsi dire, lorsque l'enfant est déjà tombé à l'eau. Main dans la main avec l’industrie pharmaceutique, son objectif est la détection précoce des maladies afin de pouvoir les traiter le plus longuement possible. Une vraie prévention n’existe pas, c’est-à-dire une sensibilisation pour ce qui pourrait éviter les maladies. Les populations sont de plus en plus exposées à la toxicité de l’alimentation et de l’environnement, au stress et à la peur qui, nous le savons, nous rendent malades. 

Pour traiter un problème, la médecine industrielle prescrit principalement des substances chimiques et des interventions chirurgicales. Elle néglige complètement ce que le patient peut faire lui-même pour guérir : se reposer, boire de la tisane, laisser la nature faire son travail. Nous avons tous entendu parler du pouvoir d’auto-guérison de notre corps – mais peu sont ceux qui lui font confiance. Beaucoup de patients ne prennent pas au sérieux les médecins qui ne leur prescrivent pas « de vrais médicaments » - c’est-à-dire des substances qui ont forcément des effets secondaires. A l’industrie pharmaceutique de se frotter les mains : son bénéfice se construit sur le fait que les gens se sentent impuissants et consomment sans trop se poser de questions. 

Particulièrement au cours des dernières décennies, nous avons oublié comment prendre soin de nous-mêmes et assumer la responsabilité de notre santé. Alors qu'autrefois nous savions que dans la nature il existe un remède pour chaque problème, nous avons aujourd’hui une formule chimique pour chaque diagnostic. Plus il y en a, mieux c'est. Il va sans dire que nos croyances et le comportement qui s’ensuit ont aussi changé nos relations avec les microbes. Ils sont de nouveaux trucs à exploiter. Nous ne les voyons pas comme l’ensemble qu’ils forment au service de la vie. Notre attitude face au Covid-19 montre que nous croyons toujours qu’il est possible de les isoler pour mieux les combattre. 

Le contrecoup

Mais les microbes ne jouent pas à ce jeu-là. Ces artistes de la survie, vieux d'un million d'années, ont appris à s'adapter en un clin d'œil aux situations changeantes. Et c’est ainsi qu’aujourd'hui, nous avons un nouveau problème : la résistance croissante aux antibiotiques. L'ancienne arme miracle nous fait de plus en plus défaut. Qu’est-ce qu’elle nous faisait rêver au début ! Nous croyions que nous allions enfin mettre la main sur la vie. La pénicilline, découverte par Alexander Fleming en 1928, a d'abord été testé sur les blessés de la Première Guerre mondiale. Dès lors, les blessures et les opérations chirurgicales ne conduisent plus automatiquement à la mort. Les possibilités d’intervenir sans gêne sur le corps semblaient désormais illimitées. 

Depuis, les antibiotiques font partie de notre vie quotidienne. Nous le savons : Ils ne sont pas inoffensifs. Non seulement ils détruisent la flore intestinale à long terme. On les soupçonne également d'être impliqués dans le développement progressif et dramatique de la maladie d'Alzheimer, de la maladie de Parkinson, de l'obésité et de l'asthme. Les agents contre la vie entrent dans nos organismes pas seulement par voie médicale. Ils font partie intégrante de notre chaîne alimentaire. Comme les animaux de nos élevages industriels ne pourraient pas supporter sans antibiotiques les conditions de vie que nous leur imposons, ils entrent dans notre alimentation directement par la viande ou indirectement par le sol. 

Ainsi, les microbes ont eu l’occasion de bien s’entraîner pour résister à nos armes. Au fil du temps, ils ont appris à développer une résistance aux 26 antibiotiques naturels découverts jusqu’à aujourd’hui. Le résultat : plus de 40 000 personnes meurent chaque année rien qu'en Europe à cause de la résistance aux antibiotiques. Ils sont actuellement 700 000 dans le monde entier : tendance explosive. La médecine et la recherche sont impuissantes face à la catastrophe qui se dessine à l’horizon. 

Comme les bactéries s'adaptent à la vitesse de l'éclair aux situations changeantes, il ne reste pratiquement plus de laboratoires prêts à investir dans la recherche de nouveaux antibiotiques. A peine un nouveau médicament est-il lancé sur le marché qu'il est déjà dépassé. La résistance aux antibiotiques menace de plus en plus de vies humaines et a converti les cabinets de médecins et les hôpitaux en des lieux hautement dangereux. Bientôt, la résistance contre les antibiotiques risque d’être l'une des plus grandes menaces pour l'humanité. Dans un monde de germes multirésistants, beaucoup des interventions courantes ne seront plus possibles. Tout ce qui perturbe notre système immunitaire est un danger mortel : les transplantations, mais aussi les interventions classiques et, surtout, les traitements agressifs contre le cancer - une des grandes sources de revenus pour l’industrie pharmaceutique jusqu’à maintenant. 

À la croisée des chemins

Tandis que l’industrie est toujours à la recherche de nouveaux ennemis et de nouvelles ressources à exploiter, nous nous trouvons à un tournant de notre histoire. Comment voulons-nous continuer ? Nous obstiner à lutter contre la petite vie, détruire durablement notre système immunitaire et risquer de perdre notre bataille contre l’intelligence de la vie ? Ou faire la paix et commencer à regarder les choses dans leur contexte. Si notre médecine s’est limitée à analyser les choses dans le moindre détail et à décomposer le vivant, les microbes nous montrent aujourd’hui les limites de notre façon de penser et de faire. En réalisant qu’un petit virus que personne n’a vu peut paralyser la planète entière, il apparaît que les microbes ont encore un mot à nous dire.

Une claque de plus pour notre égo ! Nous, le summum de la création, succombons à des moins que rien. Nous qui voulons tout contrôler, tout dominer, nous devons nous incliner aujourd’hui devant la petite vie. Tous nos artefacts sont trop grossiers pour nous protéger contre ces minus. Fébrilement, les laboratoires du monde entier travaillent sur tous les fronts pour trouver une arme contre cet ennemi invisible. Le vaccin ! Vite ! Toutes les pistes envisagées ne vont pas seulement nous transformer en OGM, mais de plus, le vaccin, s’il est trouvé, ne nous protégera pas suffisamment. A faire et à refaire alors et continuer à supporter les masques, les distances, les barrières en plastique, les regards méfiants, le télétravail, les cours à distance, les salles de théâtre et de concerts fermées, la culture et l’économie en berne, les enfants traumatisés, les anciens mourant de solitude, …

C’est cela le prix de notre « santé » ? Une médecine qui nous rend de plus en plus vulnérables ? Déjà aujourd’hui, nous avons de fortes chances de mourir d’une maladie iatrogène, causée par les traitements médicaux. La guerre ne sera-t-elle jamais finie ? N’avons-nous pas compris qu’attribuer nos problèmes à des causes externes et toujours attendre des solutions du progrès technologique nous conduisent directement dans le mur ? Regardons-nous vivre ! Elle est comment, la vie sur terre ? Plus sûre, plus belle, plus juste ? Comment vont les habitants de notre planète ? Dans quel état se trouvent l’eau, l’air, les sols ? Qu’en est-il des plantes et des animaux ? Et les humains ? Sont-ils heureux ? En bonne santé ? Vont-ils bien ? Allez-vous bien ? 

Sortir de l'enfermement

Ne misons plus sur ce « progrès » qui ne cesse de tuer le vivant. Faisons cause commune avec la Vie. Au siècle dernier, ce sont les guerres de terrain qui ont décimé l’humanité et détruit la vie sur terre. Aujourd’hui, ces guerres sont entrées dans nos corps. Ne permettons plus que l’on nous raconte ces mensonges ! N’engraissons pas cette machine meurtrière. Ne permettons pas qu’un système assassin nous prenne entièrement « en charge ». Commençons à soigner notre jardin. Il ne s’agit pas seulement de notre potager qu’il serait temps de défricher, mais aussi de notre jardin intérieur qui alimente la petite vie et la grande.

Ouvrons-nous. Libérons-nous enfin de ce carcan trop serré, de ces illusions, ces faux concepts, ces mensonges. Prenons un moment et écoutons ce que nous dit notre voix intérieure - et avec elle toutes ces petites voix de la vie : Nous ne sommes pas vos ennemis. Nous sommes vos amis. Regardez-nous faire : notre vie n’est pas dominance et exploitation, mais coopération et diversité. Nous agissons ensemble pour le bien de l’organisme entier. Prenez exemple sur nous et votre vie sera plus harmonieuse, plus paisible, plus riche aussi. Il y a assez pour tout le monde. Il y a la place pour tous ceux qui respectent la Vie. Faites-nous confiance. Laissez-vous envelopper, laissez-vous porter par cette vague puissante de vie que nous représentons. Ouvrez vos mains et acceptez le cadeau.

 

 

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